A l'heure des commémorations des 75 ans du débarquement en Normandie (V. Thivin / G. Kojima)


     Mathématicienne et écrivaine française, Michèle Audin a été cooptée oulipienne en juillet 2009.

Fille du mathématicien Maurice Audin décédé, après avoir été torturé, en juin 1957 en Algérie Michèle Audin est une férue d’histoire. Les trois œuvres que nous présentons aujourd’hui ainsi que son roman Comme une rivière (2017) et son blog sur la Commune de Paris confirmeront nos dires.


      Mademoiselle Haas, Cent vingt et un jours et Une Vie brève de M. Audin, ont pour dénominateur commun d’avoir pour toile de fond, tensions socio-politiques, conflits et guerres. La Seconde Guerre Mondiale se trouve au centre de toutes ces crises, ressentiments et belligérances. En amont, il y avait entre autres la Première Guerre Mondiale, la crise économique de 1929 et la montée de la haine contre les Juifs. En aval, se trouvera, pour ne citer qu’elles, la décolonisation et la guerre d’Algérie. Le tout s’organisa dans une sorte de réaction en chaîne incontrôlable. Pourtant, après coup, tout cela était si prévisible.

      La Seconde Guerre Mondiale concéda quand même aux femmes le droit de vote et une certaine émancipation. L’évolution des droits de la femme est le sujet central de Mademoiselle Haas. Mademoiselle Hass, ambassadrice de toutes les femmes dont la contrainte non recherchée est la soumission à un mâle pas toujours intelligent, en a assez d’entendre : « C’est un métier d’homme », et pourtant...

      Cent vingt et un jours, c’est le temps de bonheur que l’Histoire a accordé au jeune mathématicien, André Silberberg, dont il est question dans ce livre. André Silberberg est le protagoniste de ce roman. Roman d’amour ? Oui et non, car le sujet de cette œuvre est avant tout la guerre avec ses calculs abjects et tout son lot d’horreurs. Guerres et vices sans fin et vis sans fin de la guerre : en 1939, aucune leçon n’a été retenue de celle qui devait être la « der des ders ».

      En France, la spirale infernale poursuivra son action destructrice avec le « conflit d’Algérie ». « Conflit » pour ne pas dire le mot « guerre », parce que prononcer « guerre » engendre immédiatement des images de destructions, massacres et autres abominations. M. Audin le sait bien. Cette guerre-là lui a coûté son père qu’elle raconte plus directement dans Une vie brève, son père dont elle partage la passion des mathématiques, son père qu’elle a défendu au point de refuser la Légion d’Honneur.